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Légendes du Nouveau Soleil

Temps de lecture : 4 minutes

Adapter en jeu de rôle l’une des oeuvres majeures de la littérature de fantasy n’est jamais une chose aisée, mais potentiellement, c’est le rêve de tout fan de transposer sa saga préférée en jeu afin de l’explorer dans les moindres détails ou la faire découvrir à tous. Voici un petit retour d’expérience de l’auteur du Livre du Nouveau Soleil, Quentin Dumont, complété par quelques questions audio.

Il est des œuvres littéraires majeures qui, à l’instar des bêtes les plus féroces, ne se laissent que parcimonieusement apprivoiser. Certaines car leurs auteurs ne souhaitent pas les voir sortir de leurs enclos de papier, de peur qu’elles ne se perdent sur le chemin de l’adaptation. D’autres sont tellement foisonnantes et complexes qu’en dépit de tous les moyens employés pour leur permettre de quitter les pages qui les ont vu naître, elles y laissent une grande partie de leur essence, absorbée par le buvard du livre.

Légendes du Nouveau Soleil

Le Livre du Nouveau Soleil est une des (rares) œuvres majeures de fantasy du XXe siècle n’ayant fait l’objet d’aucune adaptation – excepté un essai non transformé en 1999. S’attaquer à ce monument récompensé par 3 Nebula Awards, 6 Locus Awards et 5 World Fantasy Awards est un défi d’autant plus grand que son auteur, feu Gene Wolfe, a fait le pari d’en céder les droits d’adaptation pour le monde entier pour les dix prochaines années à des Français. Des non-professionnels du JDR. Le tout pour un prix symbolique, et en leur donnant sa bénédiction pour porter l’oeuvre de sa vie sur les fonts baptismaux.

Cette quasi-donation faite par un homme que des monstres sacrés qualifient « d’auteur le plus intelligent, le plus subtil, le plus dangereux, dans la SF et hors de la SF » (Neil Gaiman), de « l’un des plus grands auteurs de SF et de fantasy du siècle dernier […] dont les livres seront encore lus dans un siècle » (G.R.R. Martin), de « trésor national » (Damon Knight) ou de « meilleur écrivain anglophone » (Ursula K. Le Guin) impose plus qu’une obligation de réussite. Elle impose une quête de perfection.

Neil Gaiman, qui nous fait l’honneur de préfacer notre JDR, considère Wolfe comme son mentor dans le domaine de l’écriture. À un niveau plus modeste, Wolfe est aussi le nôtre.

Aux Portes de l’Imaginaire : Adapter l’oeuvre d’un auteur peu connu, même s’il est l’un des piliers oublié de la SF resté dans l’ombre de nombreux autres auteurs, quel est l’enjeu derrière ?

Du livre au jeu

Adapter le Livre du Nouveau Soleil est un processus de maïeutique plus qu’une construction. L’œuvre n’est pas simple. Protéiforme, elle fourmille d’énigmes et de clés pour les déchiffrer. Encore faut-il les comprendre, alors même que l’auteur prend un plaisir malin, presque pervers, à nous les mettre sous les yeux. Elle peut se lire, selon le moment où on le fait et la période de sa vie où elle est lue, comme un quête initiatique concernant tant le héros que le lecteur qui l’accompagne, un récit héroïque, une œuvre de fantasy ou un livre de science-fiction.

Aux Portes de l’Imaginaire : Comment aller au delà des romans pour explorer des pans entiers de son univers qui n’ont pas été décrit mais qui seraient nécessaires au jeu de rôle sans trahir l’imaginaire de l’auteur ?

La quêtes des droits d’auteurs !

Qu’avons-nous fait pour convaincre M. Wolfe ?

Rien que nous n’ayons déjà fait avant. Être passionné. Lire, relire, jusqu’à les rendre transparentes, les pages de l’œuvre du Maître. Puis rédiger. Tester. Réécrire. Re-tester. Laisser reposer le travail un an ou deux pendant que l’on reprend celui que l’on a fait décanter auparavant. Reprendre. Jeter à la poubelle. Aller récupérer dans la poubelle. Hurler que nous n’y arriverons jamais. Y arriver. Recommencer ce même processus un millier de fois durant quinze ans. Se demander pourquoi on s’inflige ça alors, que, somme toute, nous menons des vies tout à fait gratifiantes et qu’on pourrait juste, nos week-ends et vacances venus, aller boire une bière autour d’un barbecue. Ou faire une partie de JDR. Bref, pour paraphraser Thomas Edison, « La réussite, c’est 1 % d’inspiration et 99 % de transpiration ».

Aux Portes de l’Imaginaire : Comment concrètement une équipe peut contacter un auteur afin d’officialiser un projet de jeu dans son univers ?

15 ans de maturation…

Le JDR Légendes du Nouveau Soleil que vous tiendrez entre vos mains est ancien. Il a commencé  à être écrit et testé en 2005. Chaque élément de règles, d’univers, de l’exemple qui vous est donné pour l’utilisation d’une compétence au plus petit jeu auquel les enfants nessuniens s’adonnent, jusqu’aux descriptions des Guildes et des Autarques, a été forgé, poli, bronzé et mis à l’épreuve. Une sélection déchirante a dû être faite, et les 464 pages du livre que vous aurez entre les mains ne représentent qu’une petite partie de l’abondant matériel dont nous disposons.

C’est pour cela, et du fait que nous n’ayons nul besoin d’éditer un ouvrage de JDR (ou un  quelconque ouvrage) pour vivre, qu’il nous a été octroyé le privilège exclusif de transcrire et développer Légendes du Nouveau Soleil. Nous espérons que vous nous suivrez nombreux (et jusqu’à la fin de la décennie !) dans cette aventure qui s’annonce aussi palpitante qu’épique.

La future couverture du jeu – Illustrateur (c) Anato Finnstark


Illustration de la couverture du jeu

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