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Langues et linguistique

Temps de lecture : 5 minutes

La plupart des jeux de rôle offrent aux joueurs un choix très vaste de personnages pouvant être incarnés, souvent de cultures et de traditions différentes. Or, un élément qui est souvent mis en arrière-plan est la langue. En effet, même si certains jeux ont trouvé un contournement habille mais pas très réaliste avec la langue commune, il serait beaucoup plus logique que des personnages d’horizons trop lointains ne puissent pas communiquer entre eux sans faire un minimum d’effort, car si une chose est sure, ils ne vont pas tous parler les mêmes langues, mais surtout, ils ne vont pas forcément les maîtriser avec la même aisance.

Dans cet article, nous n’évoquerons pas de solutions techniques pour gérer les langues, mais je vais vous présenter quelques éléments pour rendre les langues de vos univers de jeu un peu plus crédibles.

Pourquoi gérer les langues ?

Dans la plupart des jeux, il est inutile de gérer les langues parlées par les personnages des joueurs. Un exemple, dans le monde de Warhammer, la plupart des personnages proviennent de l’Empire et les aventures s’y déroulent. Les personnages parlent couramment la langue impériale utilisée par la plupart des personnages qu’ils rencontrent… mais… dans un monde plus vaste ?

La gestion des langues lors d’une partie de jeux de rôle pourrait devenir intéressante dans les cas suivants :

  • Une aventure ayant pour thème l’espionnage dans un pays éloigné ou s’ils doivent négocier avec des personnages parlant une autre langue ;
  • La présence qu’un PJ exotique à la table.

Imaginez que vous jouez à James Bond 007, dans notre aventure, votre personnage, un agent 00, est infiltré dans une base russe dans laquelle il doit obtenir des informations vitales pour l’avenir de l’Angleterre. Il prend en filature un groupe d’agents… mais ceux-ci communiquent en russe. Comprend-il ce qu’ils sont en train de dire ? Sur ce qu’il comprend, quel niveau de compréhension en a-t-il ?

Dans les jeux modernes, il est évident que l’utilisation des langues est indispensable pour conserver un minimum de réalisme. Mais cette question se pose aussi dans un jeu médiéval fantastique !

Peut-être qu’il serait intéressant de forcer un joueur qui a souhaité créer un personnage totalement exotique à apprendre à communiquer avec les autres joueurs de la table. Si à RuneQuest un joueur décide d’incarner un kralori, par quel miracle ce dernier pourrait-il parler couramment la langue des orlanthi ?

Comment évoluent les langues ?

Les langues évoluent par les migrations des populations, les conquêtes et la nécessité de disposer d’une langue commune pour les échanges commerciaux. Certaines langues vont donc évoluer, se répandre, s’adapter ou disparaître. Toutes les langues proviennent d’une langue plus ancienne qui a été transformée au fil du temps, leurs déclinaisons et évolutions peuvent être répertoriées dans des arbres où il sera possible de distinguer des groupes linguistiques et des familles de langues disposant de caractéristiques communes.

Les protolangues

Une protolangue est une reconstitution d’une langue à l’origine d’un groupe de langue. Elle regroupe les bases communes à plusieurs langues, comme par exemple, l’indo-européen commun reconstruite par comparaison des structures et de la phonétique des langues d’une même famille.

Familles linguistiques

Une famille linguistique est un groupe de langues partant d’une même protolangue. Par exemple, le français, l’espagnol et l’italien appartiennent à la même famille linguistique des langues italiques comme le latin. Une protolangue peut donner naissance à plusieurs familles linguistiques différentes. Ainsi l’indo-européen est à la fois à la base des langues italiques (français, latin, espagnol…) que des langues germaniques (allemand, anglais…) qui sont deux familles différentes (et il existe encore bien d’autres familles : les langues celtiques…).

Les langues communes ?

Désigner une langue par le terme langue commune pourrait passer pour un contournement du problème des langues dans un jeu de rôles. Dans un monde où les guildes marchandes ont commencé leur expansion, il est normal qu’elles fassent en sorte qu’une langue commune soit employée pour tous les échanges. C’est un peu le cas à notre époque de l’anglais.

Que dire des langues raciales ?

Là, c’est un peu plus discutable… alors que dans un jeu comme Warhammer, chaque race provient d’un lieu bien identifié, elles disposent toute d’une langue raciale : l’eltharin pour les elfes et le khazalide pour les nains. Dans ce jeu elles ont plus attrait à des langues régionales. Dans d’autres univers de jeu, les races sont beaucoup plus éparpillées dans le monde, il est très étonnant que la langue elfique d’une peuplade soit la même que celle d’une autre région espacée de plusieurs milliers de kilomètres… elles peuvent provenir d’une même racine, mais dans ce cas, elles devraient être considérées comme étant deux langues d’une même famille, par exemple aussi proches que le français et l’italien.

Pour plus de réalisme, préférez présenter les langues raciales comme des langues régionales, ainsi une enclave elfique qui a toujours existé au milieu de terre humaine peut très bien utiliser une forme très ancienne de la langue elfique et maîtriser la langue régionale des hommes.

Maîtriser une langue

Connaître d’autres langues est une chose, encore faut-il savoir à quel niveau celle-ci est maîtrisée. Voici un système relativement simple à partir de 5 niveaux de maîtrise. Le niveau 3 est le niveau moyen qui correspond au niveau de maîtrise de la majorité des natifs.

Niveau 1 : quelques mots

A ce niveau, le personnage est capable de s’exprimer dans cette langue pour exprimer des besoins simples : manger, boire, dormir, … il peut comprendre des choses très simples, à condition que la personne lui parle lentement. A la lecture, il arrive à reconnaître certains mots, mais son niveau est trop faible pour comprendre le sens d’un texte sans un dictionnaire. Il est incapable d’écrire cette langue.

Niveau 2 : scolaire

Le personnage maîtrise cette langue sur un niveau que l’on pourrait qualifier de scolaire. Il arrive à s’exprimer, mais il cherche assez souvent les bons mots ou il utilise des tournures de phrases de sa langue natale traduites mots pour mots. Il tombe facilement dans le piège des faux-amis, des contre-sens, … il n’arrivera pas non plus à comprendre le langage trop imagé, les figures de style. Il a une compréhension très terre à terre. Il arrive tout de même à lire un texte si il reste très simple et technique, mais n’arrivera pas à déceler un sens caché, il peut écrire un texte du même niveau.

Niveau 3 : langue maternelle

Le personnage maîtrise cette langue comme sa langue maternelle. Il n’a pas de pause dans ses discours, sauf s’il a besoin d’utiliser un langage plus soutenu que le langage oral classique.

Niveau 4 : maîtrise parfaite de la langue

A ce niveau, le personnage est capable de maîtriser la plupart des ficelles de sa langue, il dispose d’un vocabulaire très large, son écriture est parfaite. C’est le niveau d’un lettré, d’un romancier, d’un poète…

Niveau 5 : référence linguistique

Très peu de monde est capable de maîtriser une langue à ce niveau, le personnage est un académicien qui a consacré sa vie et ses études à cette langue.

Sources, références… pour aller plus loin


Crédits photographiques : « Institut de France – Académie française et pont des Arts » by Nitot – Recadrage de File:Institut-de-france-pont-des-arts.jpg. Licensed under CC BY-SA 2.5 via Commons –

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